Coronavirus : baisse attendue des dividendes
Six entreprises cotées sur dix ne devraient pas verser de dividendes ou nettement moins à leurs actionnaires, compte tenu de la crise économique sans précédent provoquée par l’épidémie de Covid-19.
Les actionnaires ne doivent pas trop compter sur leurs dividendes cette année. Selon une note, diffusée le 15 avril 2020 par l’équipe d’investissement de Janus Henderson Investors, l’un des plus importants groupes de gestion d’actifs au monde :
60% des entreprises cotées devraient suspendre ou fortement réduire le versement de leurs dividendes dans les semaines et mois à venir.
La faute en revient, bien sûr, à l’épidémie de coronavirus. Les mesures de confinement instaurées par les gouvernements pour limiter la propagation du virus Covid-19 a engendré un choc à la fois de l’offre avec la fermeture des usines et des magasins et de la demande avec la baisse de la consommation des ménages. Il en résulte une chute inédite du produit intérieur brut (PIB) des pays et des résultats financiers des entreprises.
Répercussions des mesures de confinement
« Compte tenu des pressions sur les revenus, la trésorerie et les bénéfices, un certain nombre d’entreprises ont déjà annoncé qu’elles suspendront le versement de dividendes cette année et nous pensons que d’autres vont leur emboiter le pas », estiment Ben Lofthouse, responsable de l’équipe Global Equity Income, et Jane Shoemake, directrice des investissements, de Janus Henderson Investors. Logiquement, les entreprises les plus exposées à l’état de santé économique devraient être les plus nombreuses à ne pas rémunérer leurs actionnaires.
« Les mesures de confinement mises en œuvre par les gouvernements dans le monde entier ont eu de graves répercussions sur les secteurs des loisirs, du tourisme, des compagnies aériennes, du commerce de détail et de la construction », observent les deux experts de la société britannique de gestion. À l’inverse, 40% des entreprises, dont l’activité n’est pas cyclique mais récurrente, ne sont pas trop impactées et pourraient continuer à verser des dividendes. « Cela comprend des secteurs tels que les services aux collectivités, les biens de consommation de base, les services de communication, la technologie et les soins de santé », énumèrent les spécialistes.
Considérations sociales & politiques
Il n’est pas sûr, pour autant, que toutes les entreprises épargnées ou peu pénalisées par la pandémie rémunèrent leurs actionnaires. « Un certain nombre de sociétés ont suspendu le paiement de leurs dividendes alors qu’elles avaient des bilans solides et suffisamment de liquidités pour les payer », constatent Ben Lofthouse et Jane Shoemake. En effet, il peut être socialement et politiquement compliqué pour les entreprises qui bénéficient d’aides de l’État de récompenser leurs actionnaires. En France, le gouvernement a conditionné ses mesures de soutien, et notamment le prêt garanti par l’État (PGE), au non-versement de dividendes.
D’une manière générale, les grands groupes du CAC 40 respectent la consigne gouvernementale de modération. Orange a baissé son dividende au titre de l’exercice 2019 de 0,70 à 0,50 euro. Carrefour et Véolia l’ont, eux, réduit de moitié (0,23 euro contre 0,46 euro pour le premier ; 0,50 euro contre 1 euro pour le second). Renault, Airbus, Engie, Accor, BNP Paribas ou encore Fnac-Darty l’ont carrément annulé.
Il faudra attendre les annonces prochaines des entreprises américaines sur leur politique de rémunération de leurs actionnaires pour y voir plus clair, sachant qu’elles représentent à elles seules 40% des dividendes versés dans le monde. Les experts de Janus Henderson considèrent que le versement des dividendes pourrait reprendre son cours normal dès 2021, « à condition que la croissance des nouveaux cas (de contamination au Covid-19, NDLR) atteigne un plateau, que le confinement actuel imposé par les gouvernements prenne fin et que l’économie mondiale recommence à fonctionner et se redresse ». Ce qui, il faut en convenir, fait beaucoup de conditions.